chronique d’ album|Morten Harket-Out Of My Hands

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(date de sortie Avril 2012)

MORTEN HARKET — Out Of My Hands (Universal/Island/We Love Music, 2012).

Une attente fébrile entourait ce nouvel album (le troisième en langue anglaise) de l’ex-chanteur du trio norvégien A-HA, groupe talentueux qui venait de dire définitivement au-revoir à ses fans en Décembre 2010 lors d’un concert plein d’émotions documenté depuis. A-HA, dont le dernier album studio, le superbe Foot of the Mountain, en 2009, avait définitivement montré toute la grandeur pop et la maestria romantique du songwriting de ce groupe dans un paysage où il est encore considéré, dans nos frontières du moins, comme un groupe de seconde zone. En un mot : sous-estimé.

Mais le groupe n’est plus. Et il s’agissait donc pour Morten Harket qui n’a jamais véritablement brillé en solo (sauf de ci, de là, sur Wild Seed ou Letter From Egypt, respectivement 1995  et 2008) de prouver que le son A-Ha, c’était aussi lui, et qu’il n’en était pas simplement la voix (comme le dit le sticker imprimé sur le recto du cd : The voice of A-HA. Il faut bien être commercialement viable).
En reprenant, à peu de choses près, le même personnel (Steve Osborne à la production NEW ORDER, PLACEBO, CURVE) et encore pas sur tous les titres, et ERIK LJUNGGREN, aux claviers et à la programmation, ex-ZEROMANCER, un groupe électro-indus dans la lignée (NINE INCH NAILS/FRONT LINE ASSEMBLY) et le même son synthético-épique que le Foot of The Mountain de A-HA, on ne pouvait qu’être intrigué. Surtout qu’on savait que les PET SHOP BOYS seraient de la partie. L’enfer étant pavé de bonnes intentions, le résultat n’est pas aussi réussit qu’on aurait pu le croire (ou même le vouloir) sur le papier.

S’il y a bien de bons morceaux (les deux singles que sont Scared of Heights et I’m The One, Keep The Sun Away, avec son début à la Funky Town de Lipps Inc., Lightning ou le morceau titre qui, avec son final majestueux nous rappelant le meilleur de MOGWAI, rend un peu de justice, tardive certes, au disque), ils sont plutôt dans la première moitié du disque et ce sont les morceaux rapides, uptempo.Car, à partir de la ballade Quiet, rien ne va (presque) plus, et seul le dernier morceau, avec son final grandiose, sauve l’album de la complète noyade. Surtout quand M.Harket se targue d’un essai que faute de mieux on dira “politique” avec le titre Burn Money Burn qui, avec son faux air de Fade To Grey (le tube so 1980 de Visage), nous déverse des lieux communs sur l’amour versus le pouvoir de l’argent, sur un cliché discoïde que n’auraient pas renié les pires tenants des hits parades actuels (sauvé quand même, à la fin, par un beau solo de synthé analogique).Car, si le son électronique, domine et donne plutôt une homogénéité (de façade) bienvenue au disque, c’est le songwriting ici qui fait principalement défaut.
Et il n’y a pas de Paul Waaktaar-Savoy (le principal compositeur de A-HA, absent du disque alors que des rumeurs d’avant sortie semblaient dire qu’il donnerait un ou deux titres à ce nouvel album du sieur Harket) pour relever le niveau & donner enfin du sens et de la profondeur épique & romantique à tout ça. Car M.Harket semble bien être ici engoncé (comme toujours, pourrait-on dire, si on voulait être méchant) dans une sorte de “sentimentalité” un peu mièvre et over the top, qu’on retrouvait déjà dans les morceaux les plus faibles des deux opus anglais précédents, soit une version simulée du romantisme véritable de A-HA (mais séduisante, fait de sons gorgés de cordes synthétiques, de mélodies vocales parfois très bien foutues, de gimmicks robotiques entêtants, de “hooks” grisants et obsédants, d’harmonies vocales que ne renierait pas A-HA ou d’arabesques électros exaltantes (mais toujours, parfois, à la limite du mauvais goût : le refrain “dance” de Just Believe It, alors que le morceau débutait plutôt bien, avec cette voix de tête mélancolique véritable trade-mark de M.Harket ou la guitare riffante et glam, qui semble un peu perdue et n’être pas vraiment à sa place ici, de When I Reached The Moon).
Et c’est bien le point faible du disque : le songwriting peu inspiré. D’ailleurs M.Harket ne signe ou ne co-signe que cinq morceaux sur les dix que compte le disque. Et même quand il en signe un qui est plutôt bon (Lightning ou I’m The One, déjà cité), il n’est jamais tout seul sur le texte ou la musique. Même les PET SHOP BOYS sur la ballade Listening nous avait habitué à mieux. Et du coup on a plutôt l’impression d’avoir affaire à un album maladroit, qui voudrait le son, la forme et l’essence romantique même (le succès critique, bien sûr, aussi) de A-Ha, sans s’interdire une certaine sucrerie sentimentale qu’on retrouve partout ailleurs dans les charts du monde entier et dont on n’est pas obligé de vouloir s’imposer ici dans le dernier disque d’une de nos idoles de jeunesse. Une position inconfortable même pour un Morten Harket habitué à être sous les feux des sunlights. On ne peut pas vouloir capitaliser le plus possible sur le succès critique des derniers A-Ha et en même temps tout faire jusqu’à la platitude absolue pour se laisser toutes les chances d’accéder aux charts, surtout en “bricolant” un album qui n’a aucune véritable vision artistique : voir la team de compositeurs-auteurs-arrangeurs qui se partagent les crédits du disque, j’ai relevé quatorze noms différents, comment peut-il y avoir homogénéité et vision dans ce cas ?).Ca ne peut pas marcher pour quelqu’un comme Morten Harket qui n’a jamais brillé de ses feux d’auteur/compositeur ayant une vision, ou une aura d’artiste avec un grand A,singulière ou connu pour ses goûts et ses affinités électives singulières.
Et c’est bien dommage car il y avait de quoi faire.!

Par Sylvain Courtoux pour Electrypop

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